Discours liminaire de la Présidente von der Leyen à la conférence annuelle 2023 de l'AED: faire monter en puissance la défense européenne

Discours liminaire de la Présidente a la conférence annuelle 2023 de l'AED

Cher Jiří,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Mesdames, Messieurs,

Merci de votre invitation. Quel plaisir d'être de retour à l'Agence européenne de la défense! Pendant cinq ans, j'ai eu l'honneur de siéger à son comité directeur. Et j'ai pu être le témoin direct du rôle pivot que joue l'AED dans la coopération européenne en matière de défense. Mais ces quatre dernières années, j'ai appris quelque chose de plus au sujet de l'AED. Et c'est que vous ne travaillez pas uniquement avec les ministères nationaux de la défense, mais aussi avec toutes les institutions européennes. Nous le voyons depuis l'entrée des chars russes en Ukraine. L'Europe tout entière soutient l'effort de guerre de l'Ukraine. Et, bien sûr, cela requiert une bonne dose de coopération entre les différentes institutions, notamment entre l'Agence et la Commission.

Notre task force pour les acquisitions conjointes dans le domaine de la défense nous aide à aligner les capacités de production de notre industrie sur la demande des États membres. Ensemble, nous avons permis à la résistance ukrainienne de monter en puissance. Nous avons fait la preuve de ce que nous sommes capables d'accomplir en tant qu'Union, lorsque nous unissons nos forces, lorsque nos pays et institutions travaillent ensemble, et avec nos partenaires au sein de l'OTAN. La nécessité de cette coopération plus étroite en matière de défense ne va faire que se renforcer.

L'environnement stratégique autour de nous a fondamentalement changé. Cela crée une nouvelle sorte de responsabilité pour l'Europe, que je qualifierais de «stratégique». C'est une responsabilité qui nous impose, d'abord et avant tout, de soutenir l'Ukraine dans la guerre en cours, aussi longtemps qu'il le faudra. Ce ne sera pas facile, mais c'est précisément maintenant que notre engagement doit être indéfectible. La Russie conforte actuellement ses positions. Essaie de reprendre la main. En conséquence, la situation sur le champ de bataille reste extrêmement difficile. Mais ce n'est pas un argument qui justifierait de réduire notre soutien. Bien au contraire. N'oublions pas: pour le moment, Vladimir Poutine ne contrôle même pas l'intégralité des territoires qu'il a déjà annexés. L'Ukraine a chassé la Russie de près de la moitié des territoires conquis après février 2022. Elle a même repoussé la flotte russe en mer Noire et est désormais en mesure d'exporter des céréales par le corridor maritime dégagé. La Finlande est devenue membre de l'OTAN. Ce sera bientôt le tour de la Suède. L'Ukraine est engagée sur la voie de son adhésion à l'Union européenne. Le Kremlin a privé la Russie de son accès aux économies et systèmes d'innovation occidentaux et l'a rendue dépendante de la Chine. Nous avons beaucoup accompli ensemble! Tous ces accomplissements sont autant de solides arguments plaidant pour un maintien de notre soutien à l'Ukraine. Dans le même temps, nous devons également veiller à la sécurité de l'Ukraine à moyen et long terme. L'Ukraine doit avoir les capacités de dissuader la Russie de l'attaquer de nouveau à l'avenir. C'est pourquoi les engagements que prendra l'Union européenne envers l'Ukraine en matière de sécurité à l'avenir revêtent une telle importance.

Cependant, notre responsabilité stratégique ne se limite pas à l'Ukraine. Elle s'étend aussi aux futurs membres de notre Union, comme les pays des Balkans occidentaux. Où d'anciens griefs locaux sont actuellement manipulés par des acteurs extérieurs. Et il suffit de porter le regard juste un peu plus loin pour constater que les conflits se sont multipliés partout à nos frontières. Je pense bien sûr au Moyen-Orient. Mais aussi au Sahel et au Caucase.

Au niveau mondial, la concurrence stratégique s'intensifie. Nos partenaires demandent que l'Europe s'engage davantage dans d'autres parties du monde, comme la région indo-pacifique. Et nous devons reconnaître que notre sécurité est plus étroitement liée que jamais à la leur. Nous avons appris que, lorsqu'un grand pays menace un petit voisin, c'est tout l'ordre mondial fondé sur des règles qui est menacé. Et, naturellement, nos routes commerciales et nos chaînes d'approvisionnement le sont aussi. L'Europe pourrait être appelée à jouer un rôle dans n'importe lequel de ces théâtres de conflit, proche ou lointain. Nous avons donc besoin que les forces armées des États membres soient préparées à toutes sortes de scénarios, de la guerre traditionnelle à la guerre hybride, sur terre, en mer, dans les airs, dans l'espace ou le cyberespace.

On dit toujours que notre Union a été conçue comme un projet de paix. C'est bien sûr vrai. Mais la paix exige la sécurité. Et c'est pourquoi notre Union a également été conçue comme un projet de sécurité. Sa genèse industrielle, avec le charbon et l'acier, comportait une dimension centrale de sécurité. Dans ces secteurs, la politique industrielle commune était une politique de sécurité. Puis, au cours des décennies, cette dimension de sécurité a grandi. Je ne veux pas seulement parler de la création de cette agence, ni de nos missions et de nos opérations. La plupart des politiques de l'Union ont des implications directes en matière de sécurité. Notre politique de transport, pour la mobilité militaire. Notre politique agricole, pour la sécurité alimentaire. Des échanges commerciaux à la recherche, en passant par l'énergie et les communications. Dans une période marquée par des menaces sans précédent, nous devons nous concentrer à nouveau sur la dimension sécuritaire de toutes nos politiques. Nous devons à nouveau concevoir notre Union comme étant intrinsèquement un projet de sécurité.

Bien sûr, la responsabilité de la défense collective continue d'incomber principalement aux États membres et à l'OTAN. Et nous respectons pleinement ce point précis. Notre coopération avec l'OTAN demeure essentielle et elle est plus forte que jamais. Mais la responsabilité stratégique appelle également une plus forte contribution européenne dans et à l'OTAN. Et depuis le début de la guerre d'agression à grande échelle menée par la Russie, l'idée de la responsabilité stratégique a guidé nos travaux en matière de défense. Aujourd'hui, je veux donc montrer comment tout ce que nous avons accompli jusqu'à présent peut façonner nos progrès futurs concernant la défense européenne.

Mesdames, Messieurs,

L'agence européenne de la défense va bientôt avoir 20 ans. Notre coopération en matière de défense s'est construite petit à petit, brique après brique. Et lorsque la Russie a envahi l'Ukraine en 2022, ces décennies de patient travail nous ont permis de réagir de manière rapide et résolue. Nous avons employé tous les outils à notre disposition, comme jamais auparavant. Nous avions créé la facilité européenne pour la paix afin d'accroître notre rôle de garant de la sécurité sur les autres continents. À présent, pour la toute première fois, nous fournissons une aide militaire à un pays en guerre, ici même, en Europe. Une aide à hauteur de 5,6 milliards d'euros, coordonnée au niveau de l'UE, pour livrer des chars d'assaut, des hélicoptères, des systèmes de défense aérienne, des missiles et des munitions à l'Ukraine.

Nous avions organisé des missions d'entraînement par le passé. À présent, pour la toute première fois, nous entraînons des troupes impliquées dans une guerre interétatique européenne, dans le cadre d'une mission sous le commandement du nouveau quartier général de Bruxelles. Nous avions créé le Fonds européen de la défense et la CSP afin de promouvoir des dépenses à caractère coopératif dans le domaine de la défense. À présent, pour la toute première fois, nous mobilisons l'industrie européenne de la défense pour soutenir un effort de guerre. Le Fonds européen de la défense a été complété par l'EDIRPA. Et cela a conduit à l'ASAP, l'acte législatif d'appui à la production de munitions. 480 000 obus d'artillerie ont été livrés ou sont en cours de production. Et dès l'an prochain, nous serons en mesure de produire un million d'obus par an. Il y a encore quelques années, cela aurait été inimaginable. Et cela constitue déjà un immense pas en avant pour notre coopération en matière de défense.

Ce que nous avons fait serait extraordinaire en temps normal. Mais en cette période exceptionnelle, ce n'est pas assez. La guerre en Ukraine montre que nous devons produire davantage. Aussi bien pour satisfaire les besoins de l'Ukraine que pour assurer notre propre défense et nos moyens de dissuasion. La guerre en Ukraine consomme davantage de matériel militaire que n'importe quelle autre guerre de l'histoire récente. La Russie a tiré 10 millions d'obus en un an. L'Ukraine consomme 10 000 drones par mois. Cela signifie que l'industrie européenne de la défense doit également se mobiliser. La réalité, c'est que nous n'avions pas suffisamment d'armes et de munitions à disposition. Pas de stocks importants. Et un manque de capacités de réserve. Parce qu'en temps de paix, nous pensions ne pas en avoir besoin. Il fallait que cela change. Au mois de juillet, les dirigeants de l'OTAN ont approuvé un nouveau plan d'action de l'OTAN sur la production pour la défense. Et ici, dans l'UE, nous devons pleinement nous concentrer sur nos propres capacités de production. Aucun goulot d'étranglement industriel ne doit nous empêcher d'assurer la sécurité de l'Europe.

Nous ne sommes pas en manque d'instruments européens. Il existe des projets qui présentent un grand intérêt: les drones de longue portée ou les systèmes permettant de détecter et de neutraliser les mines marines, qui pourraient s'avérer vitaux, par exemple, en mer Noire. Mais dans l'ensemble, nous n'exploitons toujours pas pleinement le potentiel de nos instruments de coopération.

La bonne nouvelle est que les possibilités de réaliser les investissements nécessaires sont bien plus grandes, depuis la forte augmentation de nombreux budgets nationaux de la défense. L'objectif de 2% fixé par l'OTAN est à portée de main pour de plus en plus d'États membres. Et c'est une bonne chose car la responsabilité stratégique exige des dépenses adéquates en matière de défense. Mais comment les fonds sont-ils dépensés? Les dépenses collaboratives des États membres n'ont connu qu'une très légère amélioration. Elles restent en deçà de 20%, très loin de l'objectif de 35% que nous nous étions fixé. Qui plus est, il ressort des derniers chiffres en la matière que les fonds supplémentaires sont en grande majorité dépensés en dehors de l'Union européenne. Nous achetons principalement seuls et à l'étranger.

Certes, cela s'explique par le besoin impérieux de faire parvenir des armes à l'Ukraine et de reconstituer les stocks nationaux. Mais cette vague d'acquisitions à court terme aura une incidence sur le long terme: premièrement, cela a un coût économique. Lorsque les États membres achètent de manière non coordonnée, cela peut faire grimper les prix. Deuxièmement, cela a un coût pour notre industrie sur le plan de la compétitivité. Ces investissements pourraient servir à renforcer l'innovation et les économies d'échelle en Europe, plutôt qu'à acheter des produits prêts à l'emploi ailleurs. Troisièmement, cela a un coût sur le plan militaire. Il y a beaucoup trop de systèmes d'armement différents en Europe. Et cela entraîne un manque d'interopérabilité.

Permettez-moi de vous donner un exemple. La brigade germano-néerlandaise utilise le même type d'obusier. Mais les Néerlandais ne peuvent pas utiliser les munitions des Allemands et vice-versa. Ce n'est là qu'un exemple parmi d'autres. Nous pourrions vous en donner beaucoup d'autres. Cela ne peut pas continuer. Enfin, acheter seul et à l'étranger peut aussi avoir un coût sur le plan de la sécurité. Nous ne devrions pas partir du principe que nous pourrons toujours compter sur le marché international pour notre approvisionnement dans le domaine de la défense. Nous devons absolument examiner nos dépendances stratégiques, afin d'éviter les conséquences opérationnelles sur le champ de bataille. De la même manière que nous devons être prêts sur le plan militaire, dans un environnement sécuritaire qui évolue très vite, nous devons également être prêts sur le plan industriel. Il s'agit là d'une composante essentielle de la responsabilité stratégique. Nous devons abandonner la logique de l'intervention d'urgence au profit de celle privilégiant la sécurité à long terme. Nous devons rattraper quatre décennies de sous-investissements et de fragmentation. Et pour y parvenir, nous devons dépenser davantage, dépenser mieux et dépenser ensemble.

Mesdames et Messieurs,

La coopération transatlantique restera essentielle, y compris d'un point de vue industriel. Mais nous avons également besoin d'avoir davantage le réflexe européen. Nous devons penser européen, depuis la planification jusqu'à la passation des marchés. Il y a ici des leçons à tirer de notre histoire récente, au-delà du domaine de la défense et de la sécurité. Au fil des quatre années de ce mandat, l'Europe a transformé la manière de conduire sa politique industrielle. Par exemple en ce qui concerne l'hydrogène, les puces ou les matières premières critiques. Il y a d'abord eu une décision politique au niveau européen. Notre Union s'est entendue pour se concentrer sur certaines industries critiques, essentielles pour l'économie de demain. Ensuite, nous avons amélioré nos règles pour faciliter l'investissement et l'innovation. Par exemple, grâce à l'accélération des procédures d'autorisation et aux cadres d'urgence. Enfin, nous avons soutenu nos nouvelles priorités industrielles à l'aide de fonds européens et nationaux afin de remédier aux défaillances du marché. Telle est l'approche que nous voulons reproduire maintenant, avec la nouvelle stratégie industrielle de défense européenne. Celle-ci s'articulera autour de quatre axes de travail.

Premièrement, la planification stratégique. Bien sûr, nous pouvons nous appuyer sur la boussole stratégique et sur le travail effectué par l'AED avec les États membres pour coordonner les planifications nationales en matière de défense. Mais pour concrétiser nos priorités stratégiques, il nous faut une programmation conjointe encore plus poussée. Nous devons identifier les capacités essentielles au niveau européen. Les projets d'intérêt commun sur lesquels nous devons concentrer nos efforts et nos ressources. Par exemple, les capacités qui sont européennes par nature: les capacités de soutien stratégiques, comme les cybercapacités, les satellites ou le transport stratégique. Mais je pense aussi aux plateformes complexes qui dépassent les capacités des États membres pris individuellement, comme la défense aérienne, et qui peuvent tirer profit d'un passage à l'échelon européen. Nous avons besoin d'une fonction de planification stratégique qui fasse le lien entre la planification au niveau national et celle au niveau européen. Cela donnera de la prévisibilité à l'industrie et réduira la fragmentation de l'offre et de la demande.

Deuxièmement, des règles plus simples et plus efficaces. Comme nous l'avons fait dans d'autres domaines, nous pouvons utiliser notre cadre réglementaire pour favoriser et simplifier la coopération. C'est encore plus nécessaire dans un domaine lourdement réglementé comme l'est celui de la défense. Par conséquent, durant la phase consultative de notre stratégie, nous demanderons à notre industrie ce que nous pouvons faire pour la soutenir au mieux. Nous avons besoin d'un cadre réglementaire modernisé, afin de donner au secteur industriel et aux États membres une prévisibilité et une cohérence à l'échelle du continent.

Troisièmement, nous devons maximiser notre potentiel en matière de double usage. Tout en renforçant notre activité de recherche et développement spécifique à la défense, nous devons également mieux intégrer les technologies civiles dans notre base industrielle de défense. Nous l'avons déjà fait, par exemple dans le domaine de la mobilité militaire. Les infrastructures de transport à double usage, comme les routes et les ponts utilisés par les convois militaires, sont essentielles pour notre sécurité et notre capacité de dissuasion. Nous avons donc travaillé avec la communauté des transports et accéléré l'utilisation de nos fonds et nos politiques dans ce domaine. Le travail n'est pas terminé, mais c'est déjà un exemple de réussite dans le domaine de la défense européenne. Et ce modèle de double usage est également appliqué dans d'autres secteurs. Par exemple, pour les satellites du système de positionnement global et de connectivité sécurisée. Nous avons déjà Galileo et nous aurons bientôt IRIS2, qui sont des ressources de l'UE et remplissent une fonction militaire. Et nous préparons le déploiement d'un cyberbouclier européen. L'Union pourrait intervenir directement dans la création d'une nouvelle infrastructure à double usage. Il y a tant d'innovations vitales, dotées d'applications dans le secteur de la défense, qui émergent des activités civiles. Nous devons créer des ponts entre les unes et les autres. La Commission exposera certaines options pour ce faire dans un livre blanc sur la recherche à double usage.

Le quatrième point porte sur la mobilisation de fonds publics et privés. Il existe déjà toute une série d'instruments de financement. Mais nous devons explorer tous les moyens possibles de récompenser, et d'encourager la coopération et la compétitivité industrielle, et aussi d'en compenser les coûts. C'est ce que fera la stratégie, notamment en suggérant de nouvelles possibilités de financement. Nous proposerons un programme européen pour l'industrie de la défense au début de l'année prochaine. Ce programme intégrera l'expérience tirée de l'ASAP et de l'EDIRPA. Et bien sûr, sans préjuger des négociations sur le futur budget de l'UE, il devra être financé de manière adéquate. Nous étudions également la manière d'encourager le passage de la recherche coopérative dans le cadre du FED au développement et à la production industrielle à grande échelle de systèmes de défense. L'ASAP était un premier pas, mais elle se limitait à un produit déjà mûr: les munitions. Nous devons nous intéresser à l'ensemble du cycle de développement des capacités, y compris le stade de la mise en œuvre industrielle et de la production. Tout cela dans le but d'orienter et de soutenir notre base technologique et industrielle de défense, en fonction de nos priorités stratégiques. Cela garantirait une plus grande cohérence et une meilleure coordination. Mais il existe également d'autres options. Nous travaillons déjà sur une exonération de TVA afin de soutenir l'acquisition conjointe et la propriété commune de capacités de défense. Nous avons déjà demandé à la Banque européenne d'investissement de renforcer son soutien à l'industrie européenne de la défense. Récemment, cet appel a été relayé par les États membres au sein du comité directeur de l'AED. C'est pourquoi je pense qu‘il est maintenant temps d'aller de l'avant. Nous réfléchissons à la manière de mieux faire reconnaître la contribution de l'industrie de la défense à la sécurité de l'Union par les investisseurs financiers durables. Et de permettre aux PME et aux start-up actives dans le secteur de la défense d'accéder à un financement de croissance. Nous devons également être à l'écoute des leçons que nous donnent nos partenaires. Observer par exemple comment les États-Unis créent une demande stable pour l'industrie, réduisent les coûts et facilitent les exportations grâce à leur programme de ventes militaires à l'étranger, le Foreign Military Sales.

Nous devons également explorer les synergies avec d'autres politiques industrielles. Prenons l'exemple de notre réglementation sur les matières premières critiques; elle a mis en évidence certains minéraux comme nécessaires à nos industries spatiale et de la défense. Si nous voulons assumer une responsabilité stratégique, nous avons besoin de ces chaînes de valeur cruciales. Or ce travail ne peut se faire qu'à l'échelle du continent. Enfin, nous devons finaliser les discussions sur la manière dont les investissements en matière de défense peuvent être pris en compte dans le cadre de nos règles de gouvernance budgétaire. Par souci de transparence, les dépenses dans le domaine de la défense doivent être prises en compte dans les dettes et les déficits publics, comme tout autre catégorie de dépenses. Mais notre cadre budgétaire peut et doit répondre à deux objectifs compatibles: garantir la viabilité des finances publiques tout en soutenant les efforts d'investissement des États membres dans les biens publics stratégiques.

Et cela vaut également pour nos capacités en matière de défense, dans un contexte géopolitique devenu plus menaçant. En particulier parce que tous les États membres ne partent pas du tout du même niveau dans ce domaine. Dans la proposition de la Commission, en avril dernier, nous avions déjà inclus la défense parmi les domaines d'investissement et de réforme prioritaires de l'Union européenne. Cet argument pourrait justifier l'extension de la période d'ajustement budgétaire d'un État membre. Au Conseil, beaucoup sont désormais favorables à ce que l'augmentation des dépenses militaires soit considérée comme un critère pertinent pour décider si un État membre présente un déficit budgétaire excessif. Et d'autres adaptations ciblées et temporaires sont encore possibles – afin de limiter les efforts budgétaires à court terme exigés des États membres qui sont en train d'augmenter leurs dépenses militaires. Cela pourrait être particulièrement pertinent pour les investissements visant à combler des lacunes capacitaires critiques. Ces investissements devraient en outre porter sur des projets collaboratifs européens. Cela permettrait d'encourager spécifiquement les projets transfrontières en Europe. S'ils les jugent acceptables, les co-législateurs pourraient tenir compte de ces suggestions lorsqu'ils travailleront sur les propositions en cours. Voilà qui pourrait changer la donne pour la défense de l'Union et sa politique industrielle dans le domaine de la défense en cette période d'exception.

Une vision stratégique. De meilleures règles. Un double usage. Et des financements. Tels sont les quatre grands piliers de notre future stratégie. Mais il y a plus, concernant la portée géographique de nos travaux. Une approche stratégique de notre industrie de la défense doit aussi se pencher sur la question des capacités de défense de l'Ukraine, en plus de nos propres besoins. Notre stratégie ne pourra être complète que si elle tient également compte des besoins et des capacités industrielles de l'Ukraine. La première étape pour y parvenir est d'inclure l'Ukraine dans le processus de consultation sur la stratégie industrielle. Cela conduira à l'intégrer dans certains de nos programmes de défense, avec l'accord du Parlement européen et du Conseil, si nécessaire. Cela permettrait non seulement de tenir compte des besoins de l'Ukraine en matière de défense, mais aussi de favoriser une plus grande convergence et une planification conjointe, entre nos forces armées et nos industries de la défense. L'Ukraine est appelée à devenir un membre de notre Union. Elle doit devenir beaucoup plus proche de nous, beaucoup plus vite. Et nous devrions faire usage de tous les leviers dont nous disposons pour y parvenir.

Ces dernières années nous ont montré qu'avec de la volonté, tout est possible. Lorsque nous unissons nos forces, des choses qui étaient au point mort depuis des lustres se débloquent très rapidement. En ces temps mouvementés, notre action doit être guidée par un sentiment puissant d'urgence. Et nous devons élargir notre coopération autant que possible, dans les limites institutionnelles qui sont les nôtres. Mais nous ne devrions pas avoir peur de nous poser des questions audacieuses sur l'avenir de la défense européenne. Nous ne pourrons pas répondre à toutes ces questions à court terme, dans les quelques mois qui nous séparent des élections européennes. Mais nous devrions malgré tout essayer de fixer un cap pour la suite, et d'imaginer comment les instruments des politiques industrielles et de sécurité qui sous-tendent notre responsabilité stratégique peuvent contribuer à parfaire notre union de la défense. Le plus urgent, à mes yeux, serait d'explorer de nouvelles possibilités de coopération en matière de défense dans le cadre des traités en vigueur. Il existe de solides arguments en faveur d'un alignement des conditions relatives aux marchés publics de la FEP et de l'EDIRPA. L'une et l'autre peuvent permettre de répondre aux besoins d'approvisionnement immédiats des États membres et de l'Ukraine, et de renforcer les bases industrielles ukrainienne et européenne. Ces deux fonctions sont cruciales pour la sécurité à long terme des États membres comme de l'Ukraine. Et tout en respectant les limites fixées par le traité, je pense qu'il est possible d'envisager que le budget de l'Union soutienne au moins cette fonction de la FEP dans un prochain cadre financier pluriannuel.

Ces questions, c'est dès maintenant que nous devrions les poser. C'est la raison pour laquelle nous présenterons déjà quelques propositions dans notre contribution au débat des dirigeants sur l'avenir de l'Europe, qui se tiendra sous la présidence belge, au premier semestre 2024.

Mesdames et Messieurs,

Les fondateurs de notre Union croyaient fermement que la défense et la sécurité devaient être au cœur du projet européen. C'est encore plus vrai aujourd'hui. Nos avancées vers la réalisation d'une union européenne de la défense sont tangibles. Cependant, les défis stratégiques auxquels nous sommes confrontés ont grandi encore plus rapidement. Regardez comme notre Union a changé en seulement quelques années. Lorsque la pandémie a éclaté, nous avons tous compris qu'il nous fallait davantage d'intégration pour faire face aux crises sanitaires. Depuis, nous avons jeté les bases d'une union européenne de la santé. Lorsque la Russie a essayé d'utiliser le gaz comme moyen de pression contre nous, nous avons tous compris qu'il fallait des investissements communs, une action commune, et même un système commun pour agréger notre demande en gaz. Depuis, l'union européenne de l'énergie a fait un véritable bond en avant. La prochaine étape est celle d'une union européenne de la défense à part entière. Afin que l'Europe puisse enfin assumer la responsabilité stratégique de son propre avenir. C'est l'une des grandes missions qui attendent notre Union ces prochaines années. Et je suis sûre que l'Europe, une fois encore, saura répondre à l'appel de l'histoire.

Merci, et longue vie à l'Europe.


Zařazenočt 30.11.2023 12:11:00
ZdrojEvropská komise fr
Originálec.europa.eu/commission/presscorner/api/documents?reference=SPEECH/23/6207&language=fr
langfr
guid/SPEECH/23/6207/

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